Mardi 7 juin 4h du matin le réveil sonne, c’est l’heure. L’heure de reprendre la mer pour rejoindre de nouveaux horizons!! 🙂
Le mouillage est calme, Antoine hisse la grand voile, nous larguons les amarres et partons vers le large encore sombre… Dans une heure les premières lueurs apparaîtrons. Encore protégé de l’île Cataja file sur l’eau, la mer est encore plate. Ça ne va pas durer…
Voilà 3 heures que notre nous sommes partis, les garçons se sont levés chacun leur tour et chacun à sa façon aussi… Dans les pleurs pour Pacôme qui n’aura pas tenu la houle dans son lit et se sera réveillé en vomissant… Hmmm je sais ce que je vais faire quand on sera arrivé! Allongé à présent sur le pont il respire, profondément pour tenter de faire passer ce mal de mer qui le tient… Il faut dire que cela fait bien longtemps que nous n’avons pas navigué avec ces conditions… La mer a forci et le mètre cinquante de creux de travers avant ajouté aux 23 nœuds sont fatals!
Malo lui est en forme, allongé tout de même dans le carré pour éviter tout désagréments!
Elian qui était d’abord bien dans son lit à fini pour venir prendre l’air et vomir à son tour… Heureusement que nous avons plusieurs seaux! Le concours serait-il lancé?! Il y a mieux comme compétition je vous l’accorde… On essaie de garder le sourire avec nos trois loulous allongés en tentant de gérer… La nave va être un peu longue je pense…
Mon Doudou lui aussi est en mode horizontal maintenant! La descente en coursive pour Pacôme n’a pas pardonné. Je suis donc seule à la barre à scruter l’horizon et à penser à l’arrivée! Le ciel est nuageux, brumeux et me semble bien chargé, des grains sont au loin… Nous sommes à 12 miles de St Kitts et nous n’en voyons rien! Seuls les quelques oiseaux nous accompagnant indiquent la présence de la terre…
7h30, des nuages sont bien épais et menaçant, je préviens Antoine pour que l’on puisse anticiper l’éventuelle montée en puissance de ce grain… Ça n’aura pas raté, 5 min plus tard juste le temps de prendre un ris que l’anémomètre s’affole et monte à 33 nœuds, la mer est soudain hachée et la houle déferlante, le grain blanc est là. On ne voit plus rien à l’avant du bateau, des trombes d’eau s’abattent sur nous, on s’active pour enlever un peu de génois. Nous n’avançons plus malgré ce vent, il est en face de nous, en avançant à 3 nœuds on se fait brasser dans tous les sens…
Cette reprise est mouvementée et loin d’être la nave rêvée… Le grain passe enfin, notre rythme cardiaque peut redescendre un peu… Au loin d’autres grains sont à prévoir…
9h, le temps est toujours gris, Pacôme et Elian ne vont pas mieux, leur meilleur ami ne les quittent plus. Antoine est toujours allongé gagné par ce mal qui ne veut pas le quitter et lui aussi s’approprie le seau à présent 😦 La fatigue accumulée ces dernières semaines pour son théâtre, ses émotions et notre nuit courte ne doivent pas y être pour rien non plus. Ça suffit, nous prenons la décision de nous arrêter à Nevis plutôt que d’aller direct à Montserrat. Nos copains Némésis nous y attendent, nous allons devoir leur fausser compagnie pour ce soir mais nous ne prenons aucun plaisir à cette nave et ne voulons pas que les garçons soient à bout de force… Allez 3 heures à tenir encore et nous serons à l’abri… Ça peut être long 3h! Le ciel n’en fini pas de s’assombrir, il devient presque noir, nous prenons notre 3ème ris pour réduire la voile, juste à temps pour gérer les 35 nœuds qui nous tombent dessus… Antoine et moi sommes fatigués de cette attention nécessaire et de ces changements. J’ai le ventre noué, je retrouve ce sentiment de crainte qui me gagne lorsque Poséidon fait des siennes… Nous subissons tous deux cette navigation… Et ce n’est pas la déferlante que je viens de me prendre sur la tête par surprise venue du large qui améliore mon sentiment! Vivement que l’on arrive!
12h20, alléluia! Nous sommes posés au mouillage de Charlestown à Nevis. Il est venté mais au moins nous sommes à plat! Un plouf calme les esprits et nous revigore un peu! On retrouve le sourire!
Mercredi 8 juin, 7h30, malgré une bonne nuit de sommeil, Antoine et moi sommes fatigués. A peine remis d’hier, nous manquons de motivation pour reprendre la route...
Celle-ci est avec une houle de face, heureusement plutôt ronde car certaines vagues sont bien hautes et Cataja s’enfourne dedans!
Nous sommes seuls au milieu de cet océan, nous n’y voyons pas âme qui vive, ni poisson, ni bateau, ni terre… La brume de sable dont nous avons entendu parler prend tout son sens, la visibilité est mauvaise et l’horizon jauni…
Notre nave se poursuit et nous n’en finissons pas de nous faire secouer! Une marmite géante qui n’en fini pas! Le ciel étant clément nous avons tout de même décidé de poursuivre notre route vers la Guadeloupe directement histoire d’en finir avec ce tronçon nécessaire mais pas toujours des plus faciles. Nos amis Nééesis ne nous ayant pas vu arriver hier sont eux aussi parti vers cette destination.
Le chenal est agité, la houle s’engouffre régulièrement dans nos trampolines, le vent oscille entre 25 et 29 nœuds travers avant, les montagnes russes en live! On peine à garder nos 6 nœuds pour avancer et être enfin derrière l’île et à l’abri! Nous ne savons toujours pas où nous allons jeter l’ancre : Deshaies au moteur peut-être, Malendure ou Rivière sens, difficile de prévoir vu notre cap changeant!
Ce passage entre Montserrat et la Guadeloupe nous rend dingue! Ça doit faire 3 heures que le gps indique 3 heures pour le traverser!! Grrrr ça n’avance pas et cela signifie que ça sera, malgré nos estimations positives au départ, une arrivée de nuit derrière l’île…
20h, nous couchons les enfants, Antoine et moi sommes comme deux zombies, quelque part au large de la Guadeloupe. Le silence est de rigueur, nous ne sommes plus très bavard, chacun à scruter l’horizon pour tenter d’éviter d’éventuels filets et avec l’envie d’arriver… Nous avons sous estimé le courant et la différence de cap et nous retrouvons à présent bien loin des côtes!
Patience devient le maître mot… Il nous faut encore 3h pour arriver plus proche et cela ne veut pas dire que nous serons arrivés au mouillage! Le vent d’est nous empêche de rejoindre en direct et nous voilà à tirer des bords pour tenter d’arriver! Les lumières de l’île paraissent pourtant si proches!! C’est quand qu’on arriiiiiive hein?!!! Je n’en peux plus, j’ai envie d’ hurler!! Le ciel étoilé est magnifique et c’est déjà énorme mais là je sature!! Depuis 7h30 ce matin, c’est plus que ce que ma préparation psychologique ne pouvait en supporter pour aujourd’hui! J’avais dit pas de nave de nuit!!! Je l’avais dit!! Et là on fait quoi hein?! Pourquoi c’est pas possible de poser l’ancre la? Hein? Et de dire stop! Je dis stop! Marre de cette journée, on se pose là et c’est tout! Quoi y a 1000 m de fond?! C’est pas mon problème!!
Il est 21h30, il nous reste 2 heures avant d’arriver sur Malendure… Les étoiles qui étincelaient jusqu’à présent semblent elles aussi fatiguées, tout comme madame la lune qui n’éclaire plus beaucoup… Dernière ligne droite…
23h30, ça y est nous y sommes! Mouillé, posé et en ayant éviter de se prendre un filet au passage! On peut arrêter de stresser et enfin rejoindre les bras de Morphée! 🙂
« Doudou, la pompe à eau d’eau douce fait un drôle de bruit »… « J’en peux plus on verra ça demain, coupe là avant de te coucher »… Je m’exécute et vais rejoindre mon homme. Il ne nous faut pas 5 minutes pour nous endormir je crois… Toutefois vers 3 heures du matin un bruit d’eau va me sortir de mon sommeil… Doucement, lentement, tiens ça fait un bruit de fontaine… Suis je en plein rêve au bord d’une cascade? Serait-ce Pacôme qui s’est levé pour aller au toilette?… Hmmm j’ouvre les yeux péniblement, me rend compte que Pacôme est dans son lit, que je ne suis pas au bord d’une rivière et surtout que mes pieds font flotch flotch en descendant de mon lit!! J’allume la lumière et voit un flot d’eau continue couler dans les coursives… J’hurle à Antoine qu’on a de l’eau qui coule!! Hein comment ça?! Vite je vérifie dans l’autre coursive chez les garçons, pareil!! Ça ne s’arrête pas!! Les jouets sont dans l’eau… Je goûte l’eau tout de même, car entre ce que mes yeux voient et les informations qui arrivent à mon cerveau, je ne sais plus si on prend l’eau de mer ou l’eau douce… elle est douce. « C’est nos tanks d’eau! » Antoine me dit que ce n’est pas les tanks mais notre vase d’expansion qui a lâché!! Vite une pinoche pour colmater!… La tête nous tourne, entre le réveil brutal et la fatigue accumulée de la journée, c’est trop.. Nous optons pour laisser ainsi, la fuite est stabilisée, nous finirons demain!…
Au petit matin, c’est l’étendue des dégâts que nous observons… Coursives pleines d’eau, matelas de coursive imbibé, affaires qui baignent dans l’eau, placard de nourriture rempli… gâchis en vue! Tout est à sortir, essorer, mettre à sécher, jeter… Nous devions retrouver nos copains Valérie et Christophe, ça semble compromis encore! Direction les magasins de bricolage pour trouver les pièces… Heureusement nous n’aurons pas mis longtemps à les avoir, une partie tout du moins… Antoine s’active, tente de réparer et changer le tout…
Le voilà une heure après, pas peu fier d’avoir gérer l’histoire!! Allez on teste! Et l’eau fut!! Yesss!! Trop fort!! Mais… Mais non ça fuit… Encore… C’était trop beau pour un premier coup d’essai! Antoine est dépité et se sent mal! Il faut dire que la posture dans laquelle il doit travailler est juste intenable, dos vrillé et tête à l’envers… Le voilà bien pâlichon!!
A quoi pensent les gars qui montent les bateaux?!! Sont-ils même déjà monter à bord? Ou alors ils en rient entre eux, genre « imaginez quand le gars devra réparer un truc comment il va galérer!! Ah ouai t’as raison on laisse comme ça! On referme tout avec les pièces direct, en cas de besoin pour les sortir ça sera plus notre problème de toute façon! »
Bref, il est tard, on file au lit et tant pis pour l’eau! La douche se fera Direction les Saintes demain pour y retrouver Némésis et y trouver un peu d’aide au besoin!
Vendredi 10 juin, le réveil est ensoleillé, il fait beau enfin! L’occasion d’admirer un peu le paysage… Malendure est un très joli mouillage et avec tous les derniers soucis, nous l’avions presque perdu de vue…
L’occasion de partir aussi en navigation… Et c’est une des rares fois que nous voyons la Guadeloupe avec ces conditions! La soufrière est quasi dégagée! Exceptionnel!! Quant au canal vers les Saintes qui habituellement vous envoie des rafales phénoménales, il nous offre un 25 nœuds régulier, une houle de 1m, des conditions parfaites avec un bon cap en plus!! Loin de la galère des deux dernières traversées!! Ouf! Nous retrouvons le sourire!!
C’est à la voile que nous arrivons vers le mouillage de Terre de Haut 🙂 Une prise de bouée et un plouf plus tard, nous pouvons rejoindre nos copains Némésis! Enfin on se retrouve!! Bon au programme fin de réparation de notre vase d’expansion. C’est d’ailleurs ici que nous allons trouver les pièces manquantes! Faut le faire quand même, sur cette ile devenue désertique en cette saison!
Merci à Christophe pour son aide, précieuse! 🙂
Allez, tout cela nous redonne du courage, nous allons pouvoir partir serein demain en direction de la Martinique… Une belle météo est annoncée il parait!